Depuis la Révolution tranquille des années 60, les étudiants et les étudiantes du Québec, se sont regroupés au sein d’associations nationales pour promouvoir et défendre leurs droits ainsi que réclamer une amélioration du système d’éducation québécois. Tout d’abord, il serait important de faire l’historique du mouvement étudiant québécois.
Avec l’élection de l’équipe du Tonnerre de Jean Lesage au début de 1960, un profond vent de changement souffle après le règne de près de 15 ans de l’Union Nationale et de Maurice Duplessis. C’est l’époque de la révolution tranquille, où beaucoup de changements auront lieu au Québec dont la nationalité de l’hydroélectricité par René Lévesque en 1962 et la création du ministère de l’éducation ainsi que des Cégeps. Sauf que le gouvernement de l’époque a oublié un petit détail, il n’y a pas d’assez de place dans les universités francophones pour accueillir les diplômés du collégial. Ce petit détail va contribuer grandement à la mobilisation étudiante de 1968.
1968, année ou le couvercle sur la marmite va sauter dans bien des pays à travers le monde. Tout d’abord, les évènements de Mai 68 en France qui vont mener à la chute du président Charles de Gaulles, le mouvement étudiant américain contre la guerre du Vietnam ainsi que la première grève générale de l’histoire du mouvement étudiant québécois à l’automne 1968. L’Union Générale des Étudiants du Québec (UGEQ) pilotera cette mobilisation, sans précédent à l’époque, au Québec et cela amènera à la création du réseau des universités du Québec tel que l’Université du Québec à Rimouski ainsi qu’à une amélioration de l’Aide financière aux études. C'est-à-dire les prêts et bourses. Cependant, l’UGEQ sortira affaibli de cette mobilisation et sera dissous quelques mois plus tard.
1974, Le raz de marée. Robert Bourassa est premier-ministre du Québec et le gouvernement est en crise. C’est l’époque de la loi 22 sur les langues officielles qui soulève l’hostilité des indépendantistes québécois ainsi que des anglo-québécois. Deux ans plus tôt, les dirigeants des trois grandes centrales syndicales du Québec sont emprisonnés par le gouvernement de Robert Bourassa à l’occasion d’une grève générale dans la fonction publique québécoise. Une récession frappe également l’ensemble du monde occidental à la suite du premier choc pétrolier[1].Le mouvement étudiant québécois est alors en lutte pour une amélioration de l’aide financière aux études. Ce qui mettra le feu au poudre, c’est des modifications par le gouvernement de Bourassa aux prêts et bourses qui rendront l’accès beaucoup plus difficile à l’aide financière aux études. L’association Générale des Étudiants du Cégep de Rimouski déclencha cette seconde grève générale dès le 18 novembre 1974 puis dès le lendemain, l’ensemble du Bas-du-fleuve sera en grève. Seulement une semaine après, près de 37 associations étudiantes furent en grève à travers le Québec. Au bout de la ligne, d’importantes améliorations seront apportées à l’aide financière aux études. Fait important à noter, lors de cette campagne pour l’aide financière aux études, il n’y avait aucune association nationale représentant les étudiants et étudiantes. C’est à la suite des évènements de 1974 que sera créée l’Association Nationale des Étudiants et Étudiants du Québec (ANEEQ).
1978, l’offensive inattendue du mouvement étudiant québécois. Le 15 novembre 1976, le Parti Québécois et René Lévesque sont élus à titre de gouvernement par la population québécoise. Une très grande majorité des étudiants et étudiantes de l’époque ont voté pour le PQ parce que celui-ci promettait l’instauration de la gratuité scolaire. Mais comme bon nombre de gouvernements, une fois élus, ils ne font pas ce qu’ils avaient promis. Deux tendances s’affrontent au sein de l’ANEEQ, celle qui demande des moyens d’action plus directs et celle qui croit encore que le gouvernement de René Lévesque tiendra ses promesses concernant le réseau d’éducation postsecondaires. La première tendance l’importera finalement et encore une fois, l’assemblée générale du cégep de Rimouski[2] déclenchera la deuxième grève générale en moins de quatre ans. Les principales revendications sont une bonification du programme de prêts et bourses ainsi que l’instauration de la gratuité scolaire telle que promise par le Parti Québécois. Des améliorations importantes seront apportes à l’aide financières aux études, cependant, la revendication concernant la gratuité scolaire restera lettre morte sauf que les frais de scolarité sont gelés depuis le début des années 70 et le resteront jusqu’en 1989.
1986, Robert Bourassa est de retour en tant que premier-ministre du Québec et Claude Ryan est nommé ministre de l’éducation. Dès le début de l’hiver 86, ce dernier émet l’opinion que la promesse de gel des frais de scolarité devrait être abandonnée et qu’il y a deux fois trop d’étudiants universitaires au Québec. L’ANEEQ organise une courte grève générale de deux semaines et qui aura pour résultat que le preminer-ministre Bourassa sera forcé de déclarer à l’Assemblée Nationale l’engagement du maintient du gel des frais de scolarité jusqu’à la fin de son mandat. Ce succès l’ANEEQ amènera la dissolution de la FAECQ[3] et la RAEU[4], deux organisations très peu actives et plus axées sur le lobbisme auprès du gouvernement. Ce qu’on appelle en bon québécois, « le lichage de cul ».
1988, l’offensive téméraire de l’ANEEQ concernant le projet de réforme de l’Aide financière aux études tourne au désastre et conduira à de profondes divisions internes entre les tenants du lobbisme et ceux du syndicalisme de combat. Ces divisions finiront par aboutir à la mort de l’ANEEQ en 1993. Cela aboutira au dégel des frais de scolarité en 1989 par le gouvernement de Robert Bourassa. Cette annonce produira des flammèches et encore une fois, tant l’Université du Québec à Rimouski que le Cégep de Rimouski déclenche la grève générale une semaine avant tout le monde. Cependant, cette mobilisation sera un échec cuisant et conduira directement à la hausse des frais de scolarité à ce qu’ils sont encore aujourd’hui.
Après ces deux mobilisations sans succès qui consacreront la naissance de la FEEQ[5] et de la FECQ[6] en 1990, le paysage du mouvement étudiant changera considérablement. L’ANEEQ sera dissoute en 1993 et laissera les deux fédérations seules aux commandes du mouvement étudiant québécois.
[1] Les pays producteurs haussent soudainement le prix du pétrole à la suite de la guerre du Kippour entre Israël et les pays arabes.
[2] Pour expliquer que les deux grèves de 74 et 78 sur les prêts et bourses aient été déclenchées par Rimouski, on n’a qu'à remarquer que 69% des étudiantes et des étudiants de ce cégep vivaient (pauvrement) de l'aide financière gouvernementale, et que cette région connaît un taux de chômage sensiblement plus haut que la moyenne.
[3] Fédération des Associations Étudiantes Collégiales du Québec
[4] Rassemblement des Associations Étudiantes Universitaires
[5] Fédération des Étudiants et Étudiantes du Québec, qui deviendra plus tard la Fédération Étudiante Université du Québec
[6] Fédération Étudiante Collégiale du Québec
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